Dr Benjamin Moulin, dernière mise à jour octobre 2022

Maladie de la prostate chez l’homme: quelles différences entre cancer et adénome de la prostate?

Les pathologies de la prostate sont très fréquentes chez les hommes. Le cancer et l’adénome de la prostate sont les deux maladies prostatiques les plus fréquentes chez l’homme de plus de 50 ans. Si elles touchent par définition toutes les deux la prostate, ces maladies diffèrent grandement par leurs symptômes, leur diagnostic et leurs traitements.

Le cancer et l'adénome de la prostate sont les deux pathologies les plus fréquentes de la prostate

Cancer et adénome de la prostate de l’homme: des différences anatomiques

Anatomie de la prostate

La prostate est une glande de la taille d’une châtaigne à l’état normal. Son volume est d’environ 30 grammes. Elle se situe sous la vessie, au dessus et en arrière de la verge et en avant du rectum. Elle est le carrefour entre l’urètre qui conduit l’urine jusqu’à la verge, et les canaux déférents qui conduisent le sperme depuis les testicules. Elle a également pour fonction de produire le liquide séminale qui participe à l’élaboration du sperme.

Cette glande est constituée de 3 zones principales: la zone périphérique, la zone de transition, et la zone antérieure.

Variation anatomique selon les pathologies

L’adénome (ou gonflement) de la prostate est une hypertrophie qui touche la zone de transition de la prostate. Avec l’âge, cette zone augmente de volume progressivement, constituant l’adénome. Au contraire, 90% des cancers de la prostate se dévellopent dans la zone périphérique.

Ces considérations anatomiques expliquent pour beaucoup la différence de symptomatologie entre les deux maladies. En effet, le développement de l’adénome se fait tout autour de l’urètre, avec progressivement une compression de ce dernier, qui explique en partie la survenue des symptômes urinaires de l’adénome: difficultés à vider la vessie, envies fréquentes et urgentes d’uriner etc… Au contraire, la plupart des cancers de la prostate se développent dans la zone périphérique qui est situé loin de l’urètre. A un stade précoce, le cancer de la prostate est donc souvent asymptomatique. Ca n’est que lorsqu’il commence à s’étendre vers l’urètre, ou les organes de voisinage (vessie, rectum) que le cancer de la prostate devient symptomatique.

En résumé, les symptômes urinaires sont souvent au premier plan dans la pathologie adénomateuse, alors qu’ils sont plutôt rares et présents à un stade avancé dans le cancer de la prostate.

L'adénome de la prostate (à droite) entraîne une augmentation du volume de la prostate qui doit être distinguée d'un cancer de la prostate.

Détection et distinction du cancer et de l’adénome de la prostate chez l’homme, le rôle du PSA

Le PSA

Le PSA (prostate specific antigen) est une molécule produite par la prostate, y compris chez le sujet jeune sans pathologie prostatique.

Son taux normal est inférieur à 3ng/ml.

A partir de quel taux de PSA faut il suspecter un cancer de la prostate?

L’augmentation du PSA est retrouvée dans la plupart des cancer de la prostate, et c’est d’ailleurs l’outil de première intention du dépistage du cancer de la prostate. Le tissu tumoral est à l’origine d’une surproduction de PSA qui entraîne une augmentation du taux. Néanmoins, il existe de multiples causes d’élévation du PSA, d’origine autre que le cancer de la prostate. Le taux de PSA normal est inférieur à 3ng/dL; Plus le taux est élevé plus la probabilité d’un cancer de la prostate est importante, avec néanmoins des faux positifs pouvant aller parfois jusqu’à des valeurs très importantes.

Habituellement, en cas de découverte d’une PSA élevée, une IRM est precrite à la recherche de lésions suspectes de cancer.

Quel taux de PSA pour un adénome de prostate?

Comme le PSA est produit naturellement par le tissu prostatique non tumoral, il apparaît logique que l’augmentation du volume de la prostate en cas d’adénome conduise également à une augmentation du PSA. Celle-ci se fait généralement proportionnellement au volume, et peut atteindre des valeurs très au delà de la normale en cas d’adénome très important.

Il est néanmoins rare dans l’adénome de prostate que le taux de PSA dépasse les 20 ng/ml, sauf pour des prostates de volume extrêmes (supérieur à 100 grammes).

Comment différencier une augmentation du PSA liée à un adénome de celle d’un cancer?

Etant donné que le PSA peut être augmenté à la fois dans l’adénome et dans le cancer de la prostate, il peut être compliqué de faire la différence entre ces deux pathologies. Ceci est d’autant plus vrai qu’étant donné leur fréquence importante, il est complétement possible que les deux maladies soient présentes (un patient avec un adénome de la prostate peut tout à fait également dévelloper un cancer de la prostate).

En pratique, la situation pouvant parfois poser problème est celle d’un patient porteur d’une grosse prostate, avec une élévation du PSA dont il est difficile de dire si elle est liée simplement à l’augmentation du volume prostatique, ou si il existe une lésion cancéreuse surajoutée.

Quelques outils sont disponibles pour aider à affiner le diagnostic.

  • La densité de PSA

La densité de PSA est le rapport entre le PSA et le volume prostatique. Il peut aider à différencier un adénome (densité basse, inférieure à 0,1) d’un cancer (densité élevée, supérieure à 0,2). Néanmoins ces valeurs peuvent être prises en défaut, et lorsque le rapport est autour de 0,15 il est peu informatif.

 

  • L’IRM de la prostate

L’irm est un examen d’imagerie de la prostate qui dure une trentaine de minutes. Il ne nécessite pas de préparation spécifique en dehors d’un lavement intra-rectal. Historiquement, l’IRM nécessitait l’introduction d’une « antenne » intra-rectale pour l’acquisition des images mais les techniques modernes d’imagerie permettent de l’éviter, et d’acquérir directement les images par voie trans-abdominale.

L’IRM permet de détecter des lésions suspectes de cancer, classées selon le score PIRADS. Dans le cas d’une élévation modérée du PSA chez un patient avec un adénome de la prostate, elle est intéressante pour sa valeur prédictive négative, puisqu’une IRM normale permet d’éliminer un cancer de la prostate significatif dans 95% des cas.

La biopsie prostatique

La biopsie de la prostate est le seul examen le plus fiable pour confirmer ou éliminer un cancer de la prostate. Elle n’est habituellement pas réalisée en première intention, mais plutôt lorsque le PSA est augmenté et que l’IRM retrouve des anomalies (appelées lésions cibles).

IRM de la prostate à la recherche de lésion suspecte
Biopsies de la prostate par voie trans-périnéale

Les traitements de l’adénome de la prostate chez l’homme

Chez l’homme, le traitement de l’adénome de la prostate consiste à lever l’obstacle à l’écoulement de l’urine pour restituer un flux urinaire normal. De cette manière, les symptômes liés à l’obstacle vont disparaître progressivement.

Les médicaments pour traiter la prostate de l’homme

Plusieurs traitements médicaux sont disponibles pour traiter l’adénome de la prostate. Ce sont habituellement des traitements journaliers. Citons entre autres les alpha-bloquants (xatral), les inhibiteurs de la 5alpha reductase (finasteride), les extraits de plantes (permixon) ou les inhibiteurs de la 5 phospho-diesterase.

L’embolisation de la prostate

L’embolisation est un traitement de la prostate via les artères, contrairement aux traitements habituels par la verge. Un petit cathéter est mis en place dans une artère du plis de l’aine puis guidé jusqu’aux artère de la prostate. Celles-ci sont ensuite bouchées afin de décongestionner la prostate et permettre l’écoulement de l’urine. L’avantage est l’absence de séquelles urinaires ou sexuelles.

Le traitement chirurgical: grattage ou rabotage prostatique, et traitement laser (HOLEP)

Le grattage ou rabotage de la prostate (RTUP= résection trans-uretral de prostate)

Le grattage (ou rabotage) de la prostate est réalisé par voie endo-urétrale c’est à dire à travers la verge. Le but est de détruire et retirer le tissu prostatique autour du conduit urétral afin de rétablir un chenal de calibre satisfaisant pour l’écoulement de l’urine. L’intervention se déroule dans un bloc opératoire sous anesthésie générale ou rachi-anesthésie. Une sonde urinaire est mise en place, qui peut habituellement être retirée dans les jours qui suivent l’intervention. Les résultats sont bon et les complications assez rare, essentiellement marquées par des infections, ou un des saignements (hématurie) qui peuvent se prolonger quelques semaines le temps que la prostate cicatrise. L’érection est habituellement maintenue suite à l’intervention, mais il existe une perte fréquente de l’éjaculation (éjaculation rétrograde).  L’incontinence urinaire post-opératoire est relative rare (2 à 3% des cas) dans les suite de l’intervention.

La destruction de l’adénome par laser Holmium: technique HOLEP

Cette technique utilise un laser pour réaliser une énucléation de l’adénome. A l’aide du laser, le chirurgien fait le tour de l’adénome pour retirer le tissu hypertrophié en totalité. L’adénome est ensuite refoulé dans la vessie pour être morcelé et permettre son évacuation par les voies naturelles. Les débris prostatiques sont finalement analysés pour exclure la présence d’une tumeur cancéreuse. Les études montrent que la techniques Holep offre une plus grande amélioration des symptômes urinaires et une baisse du risque de récidive dans les années qui suivent l’intervention. Les résultats sur le plan sexuel et urinaire sont semblables à la résection endoscopique (grattage). Les inconvénients de la technique Holep réside dans un temps d’opération plus long et la nécessité d’un chirurgien entraîné car il s’agit d’une technique techniquement challengeante.

Comparaison entre embolisation et techniques chirurgicales (grattage rabotage ou laser) pour le traitement de l’adénome de la prostate chez l’homme

Les avantages offerts par l’embolisation sont ceux d’un traitement mini-invasifs, avec un temps d’hospitalisation réduit, l’absence de sonde urinaire, la préservation de l’éjaculation et des fonctions urinaires et érectiles, et l’absence de limite par rapport à la taille de la prostate.

Les inconvénients de l’embolisation par rapport à la chirurgie sont la majoration du risque d’échec  (5 à 10% des cas), la moindre amélioration des symptômes obstructifs urinaires (difficulté à complétement vider la vessie par exemple) et un risque de récidive à long terme un peu plus important.

Ceci est à contrebalancer par le fait que la réalisation d’une embolisation ne ferme la porte à la réalisation d’aucun traitement par la suite.

Les traitements du cancer de la prostate chez l’homme

Contrairement à l’adénome prostatique, le but du traitement en cas de cancer est de retiré ou détruire l’ensemble du tissu tumoral intra-prostatique.

Le traitement chirurgical: la prostatectomie totale

La prostatectomie totale consiste à retirer l’intégralité de la prostate par chirurgie. Actuellement, la majeure partie des prostatectomies sont réalisées à l’aide d’un robot chirurgical (prostatectomie robotisée) qui offre les meilleurs résultats.

 

La radiothérapie

La radiothérapie consiste à émettre des rayonnements ionisants à forte dose qui sont ensuite dirigés à travers la peau sur la prostate pour détruire le tissu prostatique et donc la tumeur cancéreuse.

Le traitement focal (HI-FU=ultrasons focalisés ou cryothérapie)

Le traitement focal consiste à détruire uniquement une partie de la prostate envahie par la tumeur. Le but est d’essayer de préserver au maximum les fonctions érectiles et urinaires qui peuvent parfois être atteintes lors de traitements plus radicaux. Néanmoins, le traitement focal ne permet de traiter que les cancers localisés de la prostate, et ses indications doivent être discutées au cas par cas en réunion de concertation pluri-disciplinaire.

La surveillance active

Dans certaines situation de cancer peu agressif et restant localisé à une petite partie de la prostate, une surveillance active peut être proposée. Elle consiste comme son nom l’indique en une surveillance régulière notamment du taux de PSA et de l’IRM, suivi éventuellement de biopsies. Le but de la surveillance est de repoussé au maximum le recours à un traitement radical.

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