Dr Benjamin Moulin, dernière mise à jour mars 2023

Infection urinaire chez l’homme : qu’est-ce que la prostatite aigüe?

La prostatite aigue est une infection urinaire fréquente, qui touche environ un homme sur deux une fois dans sa vie. Chez l’homme, il n’y a pas de distinction entre infection urinaire et toute infection urinaire est considérée comme une prostatite. Plusieurs facteurs favorisant peuvent être retrouvée, notamment une augmentation du volume de la prostate. Le traitement repose habituellement sur des antibiotiques, et le traitement de la cause favorisante à distance.

Cet article vous propose de faire le point sur cette maladie qui lorsqu’elle est prise à temps peut être traitée facilement.

La prostatite peut être favorisée par une vessie qui a du mal à se vider

Comment faire le diagnostic d’une prostatite aigüe?

Signes cliniques

La prostatite associe généralement de la fièvre à des signes urinaires : brûlures urinaires, difficultés à uriner (dysurie), et parfois présence de sang dans les urines (hématurie). Il peut s’y associer des douleurs du pelvis parfois difficile à décrire, avec une douleur à la palpation de la prostate au toucher rectal.

Le tableau clinique peut être parfois frustre, avec simplement présence de fièvre isolée, ou de signes urinaires sans douleurs ni signes généraux.

 

Terrain, patients à risque

La prostatite est favorisée par un obstacle sur l’urètre : un adénome de la prostate, ou une sténose urétrale. Une  prostate gonflée (hypertrophie bénigne) entraîne une mauvaise vidange de la vessie et la stagnation des urines, favorisant ainsi l’infection.

La prostatite peut également survenir dans les suites d’une chirurgie de la prostate (résection endoscopique de la prostate TURP, ablation par laser Holep, ablation par Rezum, ou embolisation de la prostate), ou d’un cathétérisme intra-vésical (cystoscopie, ureteroscopie).

Le diabète de type II, l’âge, l’insuffisance rénale sont également des facteurs de risque de prostatite.

 

Comment se déclenche la prostatite ?

Le mode le plus classique est la colonisation rétrograde des voies urinaires par une bactérie, favorisée par la mauvaise vidange des urines. L’infection s’étend progressivement le long des voies urinaires jusqu’à la prostate.

La prostatite peut également survenir suite à une colonisation sanguine. Une bactérie pénètre dans le sang (via une petite coupure de la peau, ou lors de soins dentaires par exemple), et vient ensuite se loger et se développer dans la prostate.

Quels examens complémentaires pour diagnostiquer une prostatite aigüe?

Examen cyto-bactériologique des urines: ECBU

La survenue de symptômes urinaires chez l’homme doit faire pratiquer rapidement une analyse des urines à la recherche de bactéries. Cet examen qui s’appelle l’ECBU est réalisé dans un laboratoire d’analyses médicales classique. Il permet l’identification de la bactérie à l’origine des symptômes. Une fois cette bactérie identifiée, des tests sont effectués afin de connaître l’efficacité de différents antibiotiques, permettant au médecin prescripteur de choisir l’antibiotique le plus adapté.

L’échographie des reins, de la vessie et de la prostate

Une échographie doit également être réalisée (en urgence si suspicion de rétention urinaire). Elle est peu utile au diagnostic, en revanche elle permet de rechercher une complication (abcès prostatique, rétention d’urine, maladie de l’uretère ou du rein), et d’évaluer le volume de la prostate, à la recherche d’un éventuel adénome prostatique (prostate gonflée). Attention, l’échographie de la prostate par voie transrectale est contre-indiquée en cas de suspicion de prostatite. En effet, l’inflammation présente au sein de la prostate rend cet examen très douloureux, et il existe en sus un risque de dissémination bactérienne.

 

PSA, prostatite et cancer de la prostate

Le taux de PSA peut être augmenté transitoirement lors d’un épisode de prostatite. En pratique le PSA ne devrait pas être dosé lors d’une prostatite mais juste contrôlé à distance. Un délai de 2 mois est nécessaire entre l’épisode de prostatite et le dosage du PSA pour que les valeurs de ce dernier soient interprétables.

La prostatite n’a rien à voir avec le cancer de la prostate. Ces deux maladies ont une origine et un développement dissocié. Néanmoins, le bilan de la prostatite peut parfois faire découvrir de façon tout à fait fortuite un cancer de la prostate.

Est-ce que la prostatite aigüe est une maladie grave ? Quels sont les risques et les complications ?

La prostatite est une infection dont le pronostic est excellent lorsqu’elle est prise à temps. Néanmoins, en présence de facteurs de risques, de maladie associée, ou de retard de diagnostic, certaines complications peuvent survenir.

→  Complications infectieuses générales

En cas de passage des bactéries dans le sang, la prostatite peut entraîner une septicémie avec généralisation de l’infection, pouvant nécessiter une hospitalisation en soins intensifs pour réalisation de traitements spécialisés (hydratation, parfois dialyse ou réanimation cardio-vasculaire). Ces complications sont exceptionnelles en absence de terrain à risque ou de retard de prise en charge.

 

→  Le blocage des urines (rétention aigue d’urine)

L’inflammation provoquée par la prostatite va avoir tendance à faire gonfler la prostate, entraînant le blocage de l’évacuation des urines via l’urètre. Ce blocage peut être favorisé par un adénome de la prostate.

 

→  L’abcès prostatique

En cas de forte pullulation bactérienne au sein de la prostate, un abcès peut se former. Un traitement spécifique de la prostatite consiste à évacuer l’abcès à l’aide d’une ponction guidée par échographie.

Quels sont les traitements de la prostatite aigüe?

→  Antibiotiques

Les antibiotiques constituent le traitement de base de la prostatite. Ils permettent la destruction des bactéries logées dans la prostate et éventuellement dans le sang en cas de septicémie.

Il est important de toujours réaliser l’examen d’analyse des urines (ECBU) avant de débuter le traitement antibiotique. En effet les antibiotiques peuvent masquer l’infection (on parle d’infection décapitée) et empêcher d’identifier la bactérie à l’origine des symptômes, ce qui pose ensuite problème pour le choix du bon antibiotique.

Généralement le traitement de première intention est basé sur des antibiotiques de la famille des fluoroquinolones (Oflocet = ofloxacine, Ciflox = ciprofloxacine) qui ont l’avantage de bien pénétrer dans le tissu prostatique. Le cotrimoxazole (Bactrim) peut également être utilisé en cas d’allergie ou de résistance bactérienne.

Dans tous les cas, le traitement antibiotique doit être validé par un médecin, et adapté aux résultats de l’analyse d’urine, et surtout de l’antibiogramme.

→  Alimentation, hydratation et traitements naturels

Il est recommandé en cas de prostatite de bien s’hydrater (boire environ 1 à 1,5 litre par jour) pour favoriser la vidange vésicale et l’évacuation des urines.

Il n’y a pas d’aliment de traitement naturel connu pouvant favoriser ou éviter la survenue d’une prostatite. Néanmoins, certains aliments sont recommandés afin de limiter le gonflement de la prostate. Il en est de même pour les traitements naturels, comme par exemple la phytothérapie.

 

→  Alpha-bloquants pour mieux vider la vessie et améliorer la vidange vésicale

En cas de difficultés à vider la vessie associée à la prostatite, un traitement par alpha-bloquants (Xatral = alfuzosine) peut être prescrit qui va permettre d’améliorer la vidange vésicale et de limiter le risque de rétention.

Les éventuelles complications de la prostatite (rétention d’urine, abcès) sont à traiter de façon indépendante du traitement général et justifient d’un avis médical spécialisé.

Quelle guérison/évolution après une prostatite aigüe?

→  Evolution classique vers la guérison

Habituellement l’évolution est favorable en quelques jours sous traitement antibiotique.

Une réévaluation médicale est souhaitable après 72 heures pour s’assurer de la bonne évolution, ou la recherche d’une complication en cas d’évolution défavorable.

→  La prostatite chronique bactérienne

En cas de non traitement ou de traitement inadapté (durée insuffisante ou germe résistant), l’évolution peut se faire vers une prostatite chronique bactérienne. Cette maladie évolue par poussées symptomatiques et peut justifier d’examens complémentaires plus approfondis. Le traitement de fond associe le traitement d’une éventuelle pathologie favorisante (hypertrophie de la prostate, sténose urétrale), et une éventuelle antibiothérapie en cas de poussée avec documentation d’une présence de bactéries sur l’analyse d’urine.

La prostatite chronique n’est pas un facteur de risque du cancer de la prostate mais peut entraîner une élévation chronique du PSA, pouvant parfois  compliquer le dépistage du cancer de la prostate.

Deux situations à part dont la prise en charge diffère de celle d’une prostatite aigüe classique

→  Maladie sexuellement transmissible et prostatite

La prostatite peut parfois être la manifestation clinique d’une maladie sexuellement transmissible. Généralement, d’autres signes d’IST sont présents comme un écoulement trouble par la verge, ou des douleurs testiculaires. Le diagnostic est habituellement évoquer à l’interrogatoire, et le traitement à base d’antibiotiques à adapter aux prélévements. Les mesures générales relatives à la prises en charge des MST (dépistage et traitement du ou des partenaires) sont également à mettre en place.

→  La prostatite chronique non bactérienne

Cette affection chronique de la prostate provoque des douleurs pelviennes et de la prostate, évoluant de manière chronique. Il peut s’y associer des douleurs au moment de l’éjaculation et des signes urinaires. Les analyses ne montrent la présence d’aucune bactérie dans les urines.

Plusieurs causes ont été avancées pour expliquer cette pathologie (reflux urinaire dans la prostate, séquelle d’infection mal traitée…), néanmoins aucune n’est formellement validée et ce diagnostic reste à ce jour un diagnostic d’élimination.

Le traitement est à adapter au cas par cas et repose sur des mesures pour apaiser les douleurs (bains de siège), et des traitements médicamenteux pour la relaxation (myorelaxants), ou un traitement de l’angoisse (anxiolytiques).

Existe-t-il un traitement préventif de la prostatite aigüe?

→  Le traitement des causes favorisantes

Etant donné que la prostatite est souvent favorisée par l’adénome de la prostate qui entraîne une stagnation des urines dans la vessie, le traitement de l’adénome peut permettre de mieux vider la vessie et donc limiter le risque de prostatite.

→  L’embolisation de la prostate, un nouveau traitement pour l’hypertrophie prostatique

L’embolisation consiste à boucher les artères de la prostate par voie vasculaire à l’aide de petites billes. Cette intervention permet à la prostate de dégonfler et de s’atrophier progressivement. L’embolisation offre d’excellents résultats sur le plan urinaire, et a comme avantage le fait de ne laisser aucune séquelle sur le plan sexuel.

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